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Roi de la valse

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La femme, l’homme, l’un comme l’autre obstinés, l’un comme l’autre entêtés et inatteignables dans leur alvéole de volubilité, ces disants d’Annie Zadek, déroulent l’un après l’autre, parfois ensemble, la bande ou le film d’un texte inlassable, non endigable et inquiétant. Depuis toujours. Avant Le Cuisinier de Warburton, son premier livre (Minuit, 1979), avant même que ça déboule en plein public dans ce premier livre, le texte d’Annie Zadek était certainement déjà là, je le crois, déjà murmurant, raillant, injuriant, dérangeant, se détachant solitairement de la masse sociale de la parole ordinaire, par accumulations d’assertions intimistes.
Sur trois passerelles, le texte d’Annie Zadek (ce qu’écrit cet auteur) nous tient dans une même écoute et un même voyeurisme. Passerelles parallèles puisque l’édition, le théâtre et la radio composent ensemble et à chaque fois, sa chambre d’écho.

Comme si, à chaque parution d’un livre d’Annie Zadek, il était établi que le texte du livre devait simultanément s’approprier aussi l’espace de la scène et celui des ondes après celui de l’édition.
Lire ou écouter-voir, ou entendre, au temps de son avancée, ce qu’écrit Annie Zadek, à chaque fois m’enchante, à chaque fois me place dans une sensation d’agréable malaise. Je pourrais dire que je suis enchanté par ce texte qui ne cesse de rouler sa subtile monotonie et sa redondance suraiguë, à travers nos corps et sous nos yeux comme un escalator infini. Comment cette attirance, pourquoi cette nécessité de parcours, jusqu’où cette insatisfaction redemandée ? Et l’utilisation du texte édité, l’appropriation sans nécessité technique préparatoire préalable, par la scène et la radio, je le redis, souligne bien son exacte totalité insécable. Ce butin de commérages, de bavardages, de gloses, de médisances, ce paquet-commentaire s’ouvre et s’étale dans un même geste domestique sur trois plateaux de prononciation. Captation, rapt d’un dérisoire réel au quotidien se proposant comme « le plus proche » (de la vie, du désir, du rêve, de la démence ?) mais dérapant vers « toujours le plus lointain », en exprimant une impossibilité à se livrer (« je ne peux pas rester plus longtemps ») dans une séparation qui promet l’éternel retour.
Le retour de ce par quoi le texte général d’Annie Zadek déroule sous elle (sous sa langue) irrigue les terrains de ses apparitions, directement, sans recours à une situation arrêtée, ni à un paysage fixé, ni à une intrigue, ni à une fable. C’est écrit et c’est dit.
C’est tout.
N’importe quel utilisateur peut s’emparer d’un tel texte puisque, remarquez-le, aucune désignation de genre n’apparaît en sous-titre de ses livres : ce qu’elle écrit, Annie Zadek, depuis dix-sept ans, ce n’est ni du roman, ni du théâtre, ni des drames, ni des récits.
Par où saisir cette production (comme on disait) utilisable à satiété ?
Commentaire semble être le mieux disposé à un accueil provisoire de cette avancée frontale, à la trivialité bien tempérée, dont on ne sait jamais « ni si ni qui ni quand ni où… ». Jamais. Jean-Jacques Viton, "Le commentaire de A à Z", sur Roi de la valse et autres textes, à l'occasion de la mise en scène de La Condition des soies par Christophe Perton, Théâtre de Privas et de Gennevilliers, 1996

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• Jutta Legueil Verlag, Stuttgart, 1991 (bilingue allemand-français)
• Éditions Critérion (Bibliothèque contemporaine, direction M. Nuridsany), 1992
• Éditions L. Mauguin, 1995

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Couverture du livre d'Annie Zadek "Roi de la valse"

Mise à jour le 15.10.2019 © 2017 Juliette Gourlat
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